L’image vient à la fin pour une fois.
Il est commun d’affirmer que trop d’info tue l’info.
Voilà que ce matin cette phrase a pris une tout autre dimension à mes yeux.
En effet, en citant mes sources, en essayant d’expliquer le cheminement de ma pensée afin de permettre aux personnes à qui je parle de « toucher » les conclusions auxquelles je parviens, je n’avais jamais imaginé avant ce matin à quel point les mots trop nombreux constituent parfois un « trop d’info » qui tue « l’info » en question.
La veille j’avais expliqué, suite à une vidéo, qu’il nous est difficile de saisir le langage non verbal des animaux. Puis j’avais ajouté que la difficulté est d’autant plus grande que nous essayons de « comprendre » des animaux qui ont très peu de choses en commun avec nous les humains. Par exemple, lorsque nous traitons un cheval de nounours (donc ourson? ours? jouet en peluche?), nous faisons une confusion et nous induisons une grave erreur relationnelle en confondant NOS besoins d’animal de nichée avec ceux des animaux qui voient le jour loin d’un nid et se retrouvent indépendants dès ce passage de vie.
C’est seulement ce matin que j’ai pris conscience d’un fait : la réponse qui vint à la suite, suscitant mon étonnement, cette réponse s’adressait aux premiers mots de mon explication. La suite, ce qu’il m’importait d’expliquer était passé à la trappe car… trop d’information tue l’information!
Et oui, c’est ça.
ET oui, je l’ai compris.
1) Grâce à ces mots, venant à la suite d’une nouvelle tentative d’explication : « C’est bien de partager ses connaissances c’est vraiment intéressant ! Mais à force d’en avoir beaucoup j’en prends et j’en laisse aussi.
J’assimile mieux ce que j’apprends quand c’est pas trop d’infos en même temps »
2) Puis, grâce à ceux-ci venant juste après avoir re-formulé la conclusion le plus simplement possible en quelques mots. : « Ahah oui là je comprends mieux »
Et alors mille pensées se sont mise à tourbillonner, à danser une folle sarabande, à me rappeler que les recettes font recettes, que les slogans doivent comporter trois mots au maximum, que Tocqueville avait déjà écrit « ça » : « Il n’y a, en général, que les conceptions simples qui s’emparent de l’esprit du peuple. Une idée fausse, mais claire et précise, aura toujours plus de puissance dans le monde qu’une idée vraie mais complexe. »
Et alors, à quoi bon ? Me suis-je questionnée.
Il importe de dire peu.
Il importe de dire simple.
Oui, c’est vrai quand il s’agit d’éduquer un cheval.
Oui.
Parce qu’un cheval, un chien ou un autre animal dispose d’une « pensée » différente de la nôtre.
Mais les humains ?
Les humains doivent-ils être privés d’explications un peu complexes ? Sont-ils destinés à seulement appliquer des « protocoles », des « recettes » sans rien comprendre, sans questions ?
Doivent-il se contenter d’ingurgiter des idées toutes faites, à la mode un jour et démodées le suivant?
Je me pose mille questions à ce sujet.
Aujourd’hui, jour de la lecture…
Aujourd’hui où des « biens-pensants » imaginent ré-écrire des œuvres classiques afin de les rendre « accessibles au plus grand nombre »!
J’essaye d’imaginer les prolifiques auteurs du 19ème ré-écrits en cent mots maximum afin que « tout le monde » puisse « tout » comprendre !
Et une immense lassitude s’empare de moi.
Alors, me souvenant d’une phrase que j’avais citée dans l’avant-propos d’une publication, je suis allée chercher le bouquin dont je l’avais tirée et je m’y suis plongée.
Aujourd’hui, jour de la lecture, j’ai lu!
Un auteur classique, un poète que j’apprécie depuis l’enfance : Charles Baudelaire
« Les humains doivent-ils être privés d’explications un peu complexes ? »
Je ne le pense pas, mais peut-être juste laisser un peu de temps pour que celles-ci fassent leur chemin.
Il m’arrive régulièrement, sur des sujets complexes, ou qui me sont totalement étrangers, d’avoir besoin d’y revenir à plusieurs reprises, sous des angles différents, avec des approches variées. Et de réaliser, une fois le concept saisi, que l’explication m’avait déjà été faite mais que mon manque d’expérience à ce moment là, ou un contexte défavorable à la compréhension, ou… ne m’avait pas permis d’en saisir l’essence.
Et ce n’est que la répétition, la variété des approches, les recoupements d’expérience qui me permettent d’y parvenir. Mais si, sous prétexte que je ne peux comprendre du premier coup, on me prive d’explications complexes, comment parvenir un jour à une pensée plus élaborée ?
Quant à la réécriture des œuvres classiques afin de les rendre « accessibles au plus grand nombre », j’ai lu un article qui prétendait que le sujet n’était pas là, mais qu’il s’agissait plutôt d’une histoire de gros sous : la réécriture d’un ouvrage permet la publication d’une nouvelle édition qui donc rapporte aux ayant droit mieux qu’un texte tombé dans le domaine public. Et concernant Roal Dahl par exemple, les droits viennent justement d’être rachetés par une célèbre plateforme de vidéo. Je ne suis pas allée creusée plus loin, mais j’imagine, vue la tendance actuelle de recherche de profit, qu’il y a bien un fond de réalité.
Merci pour ces sujets de réflexion, même si je ne saisi pas toujours tout du premier coup des informations transmises 😉
Oui, nous sommes donc d’accord, il est nécessaire d’offrir une explication complexe à chacun, tout en respectant son besoin de questions, son besoin d’oublier pour mieux retenir, son besoin de comprendre avec les éléments dont il dispose.
Oui, évidemment et il faut parfois beaucoup de patience, beaucoup d’humilité et une gigantesque maitrise du sujet pour s’y coller.En tout cas, il n’y a rien à gagner financièrement parlant.
Car, la technique des vendeurs de « coaching, recettes, slogans » attrapes rêves est justement construite sur l’esbroufe (j’ai des exemples effrayants en stock) avec toujours une entrée en matière comprenant des termes incompréhensibles, pseudo-scientifiques semblant démontrer une bonne maitrise du sujet aux yeux des pauvres individus mis dans le collimateur. Une fois posé cette entrée en matière qui signifie « vous voyez, moi je sais, vous ne pouvez rien y comprendre », le discours devient simpliste, volontiers conspirationniste et la conclusion s’affiche très simplement : achetez ma méthode, suivez ma formation… payez…
Et la suite, c’est une avalanche de copier-coller copiés-collés qui inonde certains microcosmes, alimentant les certitudes de naviguer avec le « bon » cap!
Et in fine, qui est le plus légitime ? L’individu qui donne une valeur à ses propos en les faisant payer ou l’individu qui essaye de partager bénévolement des connaissances scientifiquement avérées au moment T ?
J’avoue ne pas avoir pris le temps de creuser l’histoire des livres « mis à la portée de tous », j’ai simplement entendu le sujet au petit matin et j’ai caricaturé.
Qu’il soit AUSSI question de business, je peux l’entendre et c’est finalement comme ce que je raconte juste en dessus avec les mêmes personnes prises pour cible sur l’air de « on se met à votre portée »!
Depuis le temps que ce « on se met à votre portée » est sur la table, quel est le résultat observable ? Dans plein de domaines ?
Les moyens de diffusion étant aujourd’hui à la portée de tous (que ce soit les livres en auto-édition, les podcasts, les vidéos, conférences ou autres formations), la valeur des propos diffusés n’est plus passée au filtre des pairs et autre comité de lecture, la reconnaissance ne se fait plus qu’au nombre de clic, ce qui a bien peu de sens.
Que quelqu’un attribue une valeur marchande au temps passé, au travail fourni ne me choque pas en soi, mais celle-ci est rarement corrélée à la valeur intrinsèque du contenu.
Au final, il faudrait déjà être expert dans un domaine, pour ne pas être mystifié lorsque l’on cherche à approfondir ses connaissances dans ce domaine… Paradoxe