Ma ville est encore submergée par les amoncellements de sacs poubelles.
Que souffle le vent et volent les papiers.
Que souffle la « colère » et brûlent les ordures.
Balayer devant sa porte… c’est une locution!
De même il est assez commun de regarder la paille dans l’oeil du voisin,
N’est-ce pas?
Je revenais de la boulangerie ce matin.
La fête foraine était encore silencieuse et pourtant les propriétaires des manèges s’affairaient en préparant l’après-midi. L’un deux, muni d’un jet à pression faisait le ménage devant chez lui et jusqu’en bas des escaliers monumentaux qui précèdent son emplacement. En bas de ces escaliers sont « rangés » des centaines de sacs, ceux des forains, comme autant de preuves de leur propre consommation. Les escalier eux-mêmes sont jonchés de cannettes vides et d’emballages gras, trâces encore vivantes du passage des consommateurs de manèges.
L’homme balayait devant sa porte…
Plus loin, dans la ruelle pavée qui mène à ce qui fut la chapelle du château, au temps lointain des princes, bien avant que le préfet Poubelle n’ait l’idée de rendre les rues plus salubres, dans la ruelle pavée une dame s’affairait.
Une belle dame d’un âge très avancé, poudrée de rose et habillée « en dimanche », balayait devant sa porte. Elle peinait à se baisser et son bras était à peine assez long pour récupérer la poussière.
Je l’ai saluée.
Nous avons échangé des propos au sujet de l’air du temps et des fleurs plantées devant chez nous.
Puis, poursuivant ma route, je me questionnais.
Combien de « on » combien de « ils » prennent le temps de balayer devant leur porte avant d’exiger que les « on » et les « ils » se chargent d’améliorer les conditions de vie de toute la société?
Et cette question, comme tant d’autres demeurent sans réponse.
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Reset (part two)

Suite à ma balade crépusculaire d’hier, les réflexions ont poursuivi leur navigation dans le labyrinthe de mes pensées.
Pour précieuses qu’elles soient à mon coeur, les gravures rupestres d’ici ne sont en réalité rien de plus que des graffitis anciens et souvent comme le montre la photo ci-dessus, des superpositions de graffitis d’époques diverses. Si les premiers remontent probablement au débarquement des berbères sur l’île (datations effectuées par les scientifiques), les suivants sont venus jusqu’à relativement récemment. Avec la modernisation de la vie ilienne, la disparition des villages ancestraux et surtout l’apport de nouveaux moyens de distraction, les rochers n’ont plus été « agressés » que par le vent et les rares pluies.
Sous cet angle de vue, les graffitis découverts hiers, juxtaposés dans les dernières années, sont dans la lignée de leurs ancêtres et tout autant acceptables.
Le goût pour l’Histoire, pour la conservation des traces d’Histoire est tout à fait récent. Par exemple, au cours des siècles passés, il était absolument « normal » de récupérer les pierres d’un édifice (fusse t-il château) abandonné pour en construire un autre. Recyclage simple, de la part de personnes qui ignoraient tout du mouvement « écologie » actuel, simple économie d’énergie (les pierres étaient déjà sur place, déjà taillées) et juste mise en oeuvre humaine de la loi scientifique « rien ne perd, rien ne se crée, tout se transforme »!
Les monument aujourd’hui admirés et déclarés « protégés » sont la suite d’autres monuments, parfois totalement disparus.
Ce qui a changé avec l’apparition de l’Histoire à la mode, c’est une certaine vénération pour le passé qui mène à l’immobiliser.
Or, la vie est mouvement.
Qui mène à l’immobiliser disais-je,
Tout en appliquant le principe « publish or perish »
Lequel, étant à mettre sur le compte de l’enseignement/l’information accessible à « tout le monde », nous oblige à considérer une pléthore de nouvelles publications capables d’effacer les anciennes alors que certaines sont elles-mêmes bâties sur l’exploration des archives en stock.
Vous suivez?
Oui, oui, il faut vivre avec son temps et je m’y efforce.
Et, j’ai bien l’impression que je suis plutôt à l’aise dans ce mouvement vers l’avant, prête à « reseter », à balayer, à faire le ménage et à me remettre à l’ouvrage avec les éléments le plus contemporains dont je dispose.
Mais combien de fois, combien de fois suis-je embarrassée, ne sachant si je dois me taire ou la ramener, combien de fois suis-je mal à l’aise en lisant des personnes qui affirment que leurs convictions (et les actes qui vont avec) sont fondées « sur les publications scientifiques » sans citer ni sources, ni l’âge de ces sources ni, trop souvent, autre chose que le titre (fait pour attirer le regard, parfois nullement étayé par le développement) ?
J’ai, dans ces circonstances, l’impression de me trouver devant une pierre recouverte de graffitis, cherchant désespérement un signe auquel me raccrocher pour y trouver un sens, une époque, pour contextualiser avec les minces éléments dont je dispose, donc… peut-être à tort?
Car oui, à défaut de croire, je doute.
Mais, oui, certainement j’habite ce monde.
Liberté et Individualisme

Liberté et individualisme!
C’est un sujet d’actualité.
En 1992, Robin Dunbar publiait une étude dans laquelle il « définissait » un nombre idéal d’individus pouvant s’entendre au sein d’un groupe. Au delà de ce nombre (évalué entre 100 et 230 pour l’humain) il est nécessaire d’envisager une structure lourde, hiérarchisée, gouvernementale et il y a inévitablement des mécontents.
Nous en somme arrivés à cette structure lourde au niveau mondial, très lourde tant les humains se sont multipliés selon une courbe exponentielle.
La société qui protégeait les individus semble, à entendre certains, être devenue dictatoriale au point de les empêcher d’exprimer librement leurs particularités individuelles.
Il suffit de regarder naitre chaque année les nouveaux groupes sensés défendre de nouvelles particularités pour en être convaincu.
Ainsi en créant des petits groupes l’espoir existe de pouvoir s’entendre.
Que le groupe s’agrandisse trop au delà du nombre de Dunbar et hop, une sécession devient inéluctable et ceux-là mêmes qui ne cessent d’exiger « une société démocratique » (concept assez flou qui serait à définir) s’empressent de mettre en oeuvre un règne qui déteste « l’autre », juge arbitrairement et détourne toute tentative de discussion pour se draper dans des croyances/certitudes extrêmement rigides.
Le mot « liberté » est porté haut sans autre définition, sans essai de le situer dans un environnement, sans essai de hiérarchisation des échelles…de liberté.
Ce mot, à la manière du verbe « aimer » est définitivement malade, à force d’être utilisé à tort et à travers, il ne signifie plus rien.
Le mot « individualisme », lui, n’apparait jamais sur les banderoles portées lors des défilés de rue. Les personnes circulant groupées ont peut-être l’impression (trompeuse) de faire partie d’un collectif?
Personnellement, je reste « un homme comme les autres » avec mes points forts et mes points faibles. Très récemment, dans un magazine sportif, il fut fait allusion à ma personne, d’abord au féminin quand il s’agissait d’abriter et d’apporter du réconfort, puis au masculin quand il s’agissait de reconnaitre un statut… d’aventurier. Cette anecdote est venue confirmer mon point de vue singulier : je suis un homme comme les autres, un individu, une personne que les autres adaptent à leur point de vue individuel en fonction de ce qui fait sens pour eux. Cette « liberté » là, de penser et de parler existe bel et bien.
De même la société est une réalité.
En temps qu’individu, nous avons chacun besoin de la société pour survivre, pour apprendre, pour exister même.
Et chaque société, depuis la nuit des temps, pose des règles et des lois. Chaque société construit ces règles et ces lois sur des croyances et des partis pris, toujours afin de maintenir un équilibre protecteur. Evidemment, règles et lois reposent sur un discours dominant toujours critiquable, même depuis l’avènement de la « démocratie » dans nos contrées, car il s’agit de définir « ensemble » le moins pire pour le plus grand nombre, donc jamais le meilleur pour chaque individu.
Pourtant chacun reste libre de chercher le meilleur pour lui-même.
Seul.
Liberté chérie (bis)

Liberté!
Voilà un mot dont il est beaucoup question en ce moment.
J’avais proposé ici un billet à propos de ma réflexion sur le sujet en début de 2019.
Dans la série des billets tagués « Covid-19 » et à partir de ce billet précisément, j’ai saisi la liberté d’utiliser ce mot « liberté » et chacun a pu le lire à sa manière, librement.
L I B E R T E : sept lettres dont six différentes
F R E E D O M : sept lettres dont six différentes
L I B E R T A D : huit lettres
Ces assemblages de signes (lettres), que signifient-ils dénués de qualificatifs, sans contexte, posés là, noir sur blanc ?
Je ne sais pas.
Un assemblage de lettres forme un mot et qu’est-ce qu’un mot perdu sur une page? Qu’est-ce qu’un mot martelé, crié, imposé, isolé ?
C’est un mot.
Parler au nom d’un mot!
Parler « au nom de la liberté »!
N’est-ce pas parler de tout?
Ou de rien?
De quoi est-il question?
D’une étroite passerelle?
De l’immensité du ciel?
D’un espace de terre pour reprendre pied?
D’un abîme dans le quel il faut se jeter?
Sur les bancs du collège, entre enfance et adolescence, je laissais vagabonder mes idées en ouvrant la cage aux oiseaux (Prévert) et en chantonnant ma liberté (Moustaki).
Sagement sanglée dans la blouse imposée, tranquillement assise à la place assignée, je regardais les profs sans les voir, je cueillais leurs propos pour m’envoler sans prévenir.
L’atterrissage était parfois brutal!
Mon nom (pas de prénom à l’époque) vibrait dans l’air de la classe accroché à une injonction : « Pouvez-vous répéter ce que je viens de dire? » et la suite était très binaire.
Sois je pouvais répéter et je récupérais une « mauvaise note d’avertissement » pour « insolence » sois j’étais incapable de répéter et je récupérais une « mauvaise note » destinée à « m’apprendre à suivre »!
J’ai appris.
J’ai compris.
J’ai cherché.
j’ai trouvé.
Un chemin qui est différent et qui me ressemble.
Grâce à toutes ces mauvaises notes, je suis devenue très rapidement une « élève très moyenne » sur les bulletins trimestriels. Les apparences, conjuguées à la puissance de la moyenne mathématique, me rangeaient dans « la norme » et c’était une véritable protection.
Car, dans notre monde très binaire de « pour » et de « contre » il me fallait un fil à suivre, un fil d’équilibriste tendu entre une utopie et la réalité, entre un mot qui ne signifie rien lorsqu’il est seul (liberté) et un mot qui prend tout son sens lorsque la société veille (liberté).
Plus d’un demi-siècle plus tard, en regardant l’actualité, les « pour » et les « contre » qui manifestent, qui s’étripent parfois, qui campent sur leurs positions toujours, je ressens la même solitude qu’autrefois, que celle qui m’a assaillie dès la sortie de l’enfance, et je me dis c’est peut-être la marque d’une certaine liberté de pensée et d’une certaine liberté d’agir.
Vie quotidienne
Chaque fois que je sors de « chez moi », de ma ville, de mon pays, j’ai besoin de voir « tout », c’est à dire de trouver, au delà des clichés touristiques, ce qui fait le quotidien des personnes qui vivent « ailleurs ».
Les écoles et les centres de soins sont les endroits stratégiques qui donnent le ton.
Inévitablement, je vais en explorer les abords. Il n’est pas rare que j’entre carrément pour mieux visiter et « sentir » l’ambiance.
Ces jours-ci, dans le village du Northshore d’une île ne vivant que par le tourisme, j’ai la chance de pouvoir entrer dans la « Escuela Infantil Municipal » puisqu’à l’heure des parents, je vais y chercher ma petite fille.
Chez nous, on parlerait plutôt de crèche puisque cette « Escuela » est destinée uniquement aux enfants de 3 mois à 3 ans dont les parents travaillent. Ici, c’est écrit « Escuela » au dessus de l’entrée.
Et ici, dès la « moyenne section » de la crèche, c’est à dire dès que les bambins marchent, l’uniforme est la règle dans les écoles. Ainsi quand on va au parc, il est possible de savoir d’où sortent les enfants qui y jouent : c’est écrit sur leur tee-shirt!
Ma petite fille reste à la crèche chaque jour, du lundi au vendredi, de 10 heures à 15 heures.
15h, c’est l’heure des parents!
Et comme devant toutes les écoles de France et de Navarre, certains parents attendent devant la porte en bavardant et d’autres se racontent leur vie à la sortie.
Ainsi, les parents des plus de deux ans échangent-ils souvent au sujet de l’école dans laquelle ils vont « mettre » leur enfant l’année prochaine.
Et c’est vraiment très amusant pour moi d’entendre leurs soucis.
Car, ici, c’est un village sur une île.
Car, ici, la délinquance frôle les 0%.
Car, ici, les habitants sont arrivés de partout : d’Europe ( Espagne continentale, Italie et Allemagne principalement), d’Afrique du nord (principalement Mauritanie, le Sahara occidental est tout proche à vol d’oiseau, donc … à la nage… ou en bateau), d’Amérique du sud (principalement Argentine peut-être en raison des racines italiennes des argentins?)
Car ici, beaucoup, beaucoup de personnes sont parfaitement bilingues, voire trilingues et plus.
Logiquement, les parents rêvent pour leurs enfants.
Et logiquement leurs rêves sont multilingues et multicultures.
Et… probablement comme « partout », le choix de l’établissement d’enseignement « obligatoire » semble vraiment stratégique.
Ici, l’école du centre du village, la plus proche du vieux village où est située l’unique « Escuela Infantil Municipal » est celle où devant l’entrée et la sortie se rassemblent la grande majorité des mauritaniennes, drapées dans leurs merveilleux voiles translucides et multicolores.
Etrangement cette école maternelle (on est encore loin de l’université!) ne fait pas l’unanimité parmi les personnes qui rêvent d’un avenir multilingue et multiculture pour leurs enfants.
Ca me fait sourire.
L’année prochaine, c’est devant l’école maternelle que j’irai écouter ce qui se raconte.
Peu importe l’uniforme que portera ma petite fille, j’irai ensuite au parc ou à la plage pour jouer avec elle, sans me préoccuper de ce que pensent les « locaux » au sujet de l’écusson brodé sur son tee-shirt.
Et dans mon regard, le monde est et restera multicolore, passionnément.
La chute de l’espoir
Quand je raconte ma vie scolaire dans une école de banlieue Lyonnaise en affirmant que nous étions seulement 6 filles sur 45 à faire notre entrée au Lycée après le CM2 (oui, le collège n’était pas encore inventé, le lycée commençait en 6ème), j’ai l’impression que personne ne peut me croire.
En retrouvant ce Diplôme que mon père a obtenu sans mention à l’âge de 15 ans, c’est une trace de la société moderne qui vient s’afficher sur ce blog-note à l’image de la société postmoderne que nous habitons aujourd’hui.
L’agitation actuelle faisant les choux gras des médias, je ne peux y échapper et une fois de plus je constate que les camps se construisent, chacun s’arque-boutant sans nuance sur un mot ou un autre, incapable de s’asseoir pour réfléchir et envisager la réalité sous un autre angle que celui du combat.
L’espèce humaine est certainement l’une des espèces animales la plus combative, la plus cruelle et le pacifisme n’est de mise que dans les livres quand il n’y a vraiment rien d’autre à faire.
Ce n’est pas le sujet de ce billet, je vais en venir au fait.
Le fait, c’est qu’après avoir échafaudé des espoirs, les empilant l’un sur l’autre par dessus le vide pendant des années et des années, tout est en train de se casser la figure.
Mon père avait fait mieux que son propre père, lequel n’avait pas décroché ce prestigieux diplôme. Oui, « prestigieux » : je me souviens de fermes familiales au sol en terre battu où ces diplômes soigneusement encadrés trônaient accrochés au dessus de l’âtre, parsemés de crottes de mouches.
Mes parents n’avaient qu’une idée fixe pour nous : que nous n’ayons pas à revivre la guerre qu’ils venaient de traverser et que nous « fassions mieux qu’eux ». Mai 68 ayant contribué à lever beaucoup de verrous, le meilleur était permis : le Brevet, le Baccalauréat (on disait le mot en entier à l’époque et il y en avait plein la bouche d’éloge et/ou d’envie), l’Université, et plus loin pourquoi pas l’une ou l’autre des quelques prestigieuses Grande Ecole ?
Loin de moi l’idée d’affirmer que subir les espoirs des parents était chose facile.
Néanmoins, l’espoir était là, partout, tout alentours et bien palpable et il tissait un filet invisible qui nous poussait à regarder plus loin, plus haut et vaillamment.
Et tout s’est emballé!
Beaucoup de filles de ma génération ne se sont pas contentées de « faire un peu mieux » que leur mère, beaucoup de garçons ne se sont pas contentés de « faire un peu mieux » que leur père. Nous avons poussé loin nos études et bousculé « la tradition ».
Je vais éviter de brosser le tableau de ce que j’observe aujourd’hui dans la société sur laquelle j’ouvre ma fenêtre chaque matin.
Je connais les aventures de mes fils.
Aux dernières nouvelles, après huit ans d’études et beaucoup d’errances, le plus jeunes semble trouver une voie et cherche du côté du jardinage biologique. « Jardinier », comme mon arrière grand-père ! Je suis tellement fière et heureuse de le voir enfin donner (peut-être) un sens à sa vie avec ce choix.
Et pour en revenir à l’actualité, quand les gens s’affrontent et se crispent sur certains mots, ils en oublient la voie du milieu, dissertant au sujet des sources d’énergie pour faire rouler leur char plutôt que de poser le problème, plutôt que d’envisager l’à venir avec désespoir ( je suis lectrice passionnée de Comte-Sponville) et donc plein de possibles : avoir une boulangerie proche et donc marcher à pied pour acheter le pain quotidien, viser un simple diplôme de fin d’étude (mes parents lisaient énormément et écrivaient sans aucune fôte d’ortaugrafe) et aller à l’école en vélo, se nourrir au fil des saisons et de la production locale, le tout sans négliger le nourriture spirituelle, etc…
Mais que tout ceci est simple à écrire pour qui, comme moi a réussi un long passage de vie.
Comme tout ceci est simple à prêcher pour ceux qui vivent grâce à leurs prêches.
Comment donc, bon nombre de grands enfants trop gâtés, comment donc tant de personnes préférant les liens d’argent aux liens familiaux, comment donc ces personnes croulant sous les crédits sur l’air de « tu possèdes donc tu es », comment donc toutes ces personnes peuvent-elle comprendre et entendre que demain est toujours différent d’aujourd’hui et encore plus d’hier ?
Chercher la source
Hier matin.
Sur la page d’un « ami » FB,
Le titre était ronflant et il faisait écho à mes convictions.
En plus, il était en anglais, c’est dire s’il paraissait sérieux à mes yeux de gauloise.
J’ai donc remonté le fil.
L’article était à minima en lien avec le titre, c’était moins pire que parfois.
En le parcourant en diagonale mais attentivement, j’en tirais un nom mais pas de sources plus précises.
La publicité était bien là et comme d’habitude d’autres titres conduisaient vers des billets d’une teneur tout aussi douteuse, la couleur tonitruante des images attirant la curiosité comme la lumière attire les papillons.
Il m’a fallu environ 30′ pour trouver la « new research » qui « claimait » dans le titre.
30′ c’est hyper long.
Généralement je trouve en deux secondes.
C’est que la recherche « nouvelle » datait de 2011… C’est drôle.
Comme d’habitude, c’est une recherche un peu bidon qui avançe des statistiques très générales à partir de l’étude d’un échantillon de… 16 personnes… Le monde entier, quoi!
L’article partagé par l’ami FB n’est pas daté, mais tiré d’une « open source », un article à peine meilleur daté de deux mois en arrière, lequel fait toujours allusion à la même « new research » datant de 2011
Bref. N’ayant pas de temps à perdre, j’ai stoppé là une curiosité qui relevait du futile.
Sans aucune illusion.
Il y aura encore maintes duplications interprétatives de cette « source » lointaine que personnes n’est jamais allé regarder plus loin que « l’abstract ».
Et toutes mettront « à la une » une belle image et un titre ronflant pour vendre du temps de cerveau disponible aux publicitaires!
Et les personnes friandes de ce qui a trait à leur microcosme se précipiteront pour partager, affichant, en fait, seulement et rien de plus que leur conviction (le titre du billet) sans autre preuve tangible que leur croyance, tout en étant fière de « voir » leur croyance validée sur la toile!
Pourquoi parler de « ça ».
Parce que : https://www.lemonde.fr/les-decodeurs/article/2018/11/13/ca-doit-se-savoir-alter-sante-libre-info-un-seul-homme-derriere-un-reseau-de-desinformation_5382951_4355770.html
et aussi :
En fait, je n’ai jamais été capable de me contenter de « croire ».
Derrière les titres, il y a généralement un site qui raconte parfois, une histoire même pas en rapport avec le titre et, qui toujours balance une tonne de publicité. Je reste sans voix à chaque fois et encore plus quand la personne qui m’y a conduit « en partageant » est une personne que j’apprécie.
Ca me rend triste.
Est-il possible d’apprendre aux enfants et aux ados à chercher les sources quand, parent, on est (ou parait être ?) crédule ?
Est-il possible d’apprendre aux enfants à ne partager que ce dont-ils sont certains, que ce qu’ils ont eux-même créé plutôt que ce qui ne leur appartient pas et ce qu’ils ne maitrisent pas?
Je ne sais pas.
Certains enfant naissent-ils avec un goût pour la recherche, l’exploration et l’aventure autonome plus fort que d’autres ?
Je ne sais pas.
Faire plus avec autant
Les bisounours distribuent les leçons de morale qui ne tiennent pas debout : par exemple il serait possible de faire plus avec moins!
En 1789, dans son Traité Elémentaire de Chimie, Antoine Lavoisier écrivait :
« On voit que, pour arriver à la solution de ces deux questions, il fallait d’abord bien connaître l’analyse et la nature du corps susceptible de fermenter, et les produits de la fermentation ; car rien ne se crée, ni dans les opérations de l’art, ni dans celles de la nature, et l’on peut poser en principe que, dans toute opération, il y a une égale quantité de matière avant et après l’opération ; que la qualité et la quantité des principes est la même, et qu’il n’y a que des changements, des modifications. »
En 1970, j’ai compris les équations chimiques grâce à la maxime « rien ne se perd, rien ne se crée ». Quelle que soit la complexité des molécules à « inventer », il fallait faire avec ce qu’on avait sous la main et si quelques électrons pouvaient se balader librement, jamais il ne disparaissaient, jamais il ne sortaient par magie.
Dans le discours ambiant, l’utopie galopante consiste à dire : il est possible de faire plus avec moins ! Et je viens de vérifier, il y a pléthore de sites remplis de pubs qui expliquent comment consommer des trucs nouveaux dans le but de réussir à faire plus avec moins.
C’est un peu du genre : achetez une machine à pop-corn, vous aurez un bol mieux rempli avec votre maïs quotidien.
Non… Ils n’osent pas, ce serait un peu gros !
Quoique… ni la subtilité, ni la modération n’étant des armes de vente massive, je me suis vraiment amusée à lire ces sites « populaires ».
Car, bien entendu, personne n’est disposé à faire moins avec moins.
De surcroit, l’ensemble des populations qui commencent tout juste à entrevoir le potentiel jouissif de la consommation accélérée est enthousiaste à l’idée de faire plus avec plus. Comment leur en vouloir?
Pour nous, les enfants gâtés de la planète, réussir à faire plus avec pas moins ce qui revient à faire plus avec autant est déjà un énooooooorme challenge.
Mais…
Mais s’insurgent les bisounours, il faut se restreindre, il est urgent de se serrer la ceinture!
C’est qu’ils ignorent ou feignent d’ignorer la réalité de la vraie vie : tout annonce de disette encourage à stocker! Le corps lui-même, sous l’effet du mental est ainsi disposé : il suffit de lui faire croire qu’il pourrait manquer pour que l’appel de la gourmandise se fasse impérieux.
De fait, plus la menace de « manquer » est agitée, plus il est « physiologiquement » logique de consommer.
C’est la vie.
Il faut être en confiance, il faut être bien installé et ne manquer de rien pour commencer à songer au confort envisageable avec moins que plus.
Etant dans cette position de nantie raisonnable, j’ai acheté du tissus pour torchons et dans la quantité prévue pour couper trois torchons, j’en ai coupé quatre.
Ayant observé depuis de nombreuses années que les torchons partent dans la machine à laver avant d’être vraiment sales, je pense que les confectionner plus petits ne changera pas la vie familiale.
Toujours plus
Tout est résumé par l’image ci-dessus.
C’est un peu court comme texte?
OK.
Toujours plus… nous consommons toujours plus
Toujours plus… nous sommes toujours plus polluants
Le plus loin possible… L’important étant que nous ne voyons rien de nos yeux.
Que les mots sont insuffisants!
Moi qui aime dire « à plus loin » en pensant au ciel et à l’horizon,
Voilà que je parle de « plus loin » en pensant aux ouvriers esclaves qui crèvent, aux lacs de boues toxiques, aux paysages défigurés, aux monceaux d’immondices que nous produisons tous… au loin!
Et oui…
Ce matin, il était question des terres rares dans mon poste de radio préféré.
C’est un sujet à la mode ces jours-ci!
C’est toujours amusant de voir que parfois je suis à la mode, l’espace de quelques jours, en regardant toujours plus loin que le bout de mon nez.
La mode va passer.
Mon nez va rester.
Et puis, sitôt avalé mon premier café,
Comme par hasard
La première « actualité sur laquelle « je tombe » grâce aux algorithmes
Savamment calculés des réseaux sociaux que je consulte sur mon laptop
Dont je ne pourrai me passer
Bien qu’il soit
Bourré de terres rares et alimenté à l’électricité nucléaire
Je tombe donc sur une page d’artisanat d’art
Ventant l’art brut, la matière respectueuse
Respectueusement produite.
Et donc… je découvre des objets de décoration
Certes fort agréables au regard.
Car personne ne mangera dans ces poteries brutes
Aussi belles que celles que j’ai vu en Afrique
Celles qui étaient là-bas « la vaisselle » ordinaire avant que le plastique
Occupe le terrain.
Car personne ne se drapera dans les tissages
Aussi beaux que ceux que j’ai vu dans les montagnes berbères
Ces tissages qui réchauffaient avant que les fringues recyclées
Ne débarquent de chez nous.
Toujours plus
Toujours plus de décoration,
Toujours plus d’inutile
Toujours plus d’utile
Toujours plus de facilité
Toujours plus de confort
Toujours plus de consommation
D’argent échangé
Et d’inconscience de « tout ça »!
Nous sommes simplement, totalement, formidablement humains
Et l’homme est un loup pour l’homme
C’est bien connu.
Et qu’est-ce que je fais de « tout ça »!
Ben…
Logiquement, parce que je vis avec mon temps
Comme ma grand-mère me l’a appris,
Je l’écris sur mon laptop,
Plein de terres rares
Alimenté grâce à l’électricité nucléaire
Afin de stocker mes réflexions en goguette
Dans d’énormes mémoires
Sises dans d’énooooooormes hangars
Qu’il faut réfrigérer
A grand coup de précieuse énergie
Qui coûte
Et bouffe les vies.
Et c’est la vie,
Sans marche arrière possible
Faire plus, c’est toujours plus!
Ecouter pousser les fleurs (1)
Tout d’abord, Adèle est née.
Et puis, la nuit suivante, en écoutant parler dans une émission radiophonique, j’ai entendu des mots de maïeutique.
Une vague, puis une autre.
Une vague, puis une autre et au loin peut-être une belle série.
Tous les surfeurs savent qu’il faut ramer, aller au devant de la série, se positionner au pic…
Sans prendre ce risque là, il est vain de rêver aux grosses vagues!
Je me suis positionnée, j’ai envoyé un message.
La réponse est arrivée, j’étais bien placée, il suffisait d’attendre.
Mercredi matin, aucun avis n’était venu à l’encontre des prévisions prévues.
La bonne heure était là.
En marchant, je m’étonnais une fois de plus de l’absence d’attente, donc de tension.
J’étais tranquillement prête à prendre la vague, à me laisser glisser en acceptant aussi bien l’idée d’une grosse gamelle que celle d’une belle émotion, voire l’idée de… rien.
En fait je me rendais à un rendez-vous dont j’ignorais tout sinon un lieu et un horaire.
Une fois dans la place, j’ai aperçu une personne qui pouvait être celle du RV.
La même personne que celle qui avait parlé de mise au monde au milieu de la nuit,
Celle de « mon » RV donc!
Elle était fort occupée cette personne, postée devant un écran de laptop sur le comptoir de la réception.
J’ai envoyé un SMS pour signaler ma présence.
RIen.
Quelques minutes plus tard, elle rentrait dans l’ascenseur.
Bien installée dans mon fauteuil, je ne perdais pas une miette de cette palpitante aventure.
L’heure tournait et dépassait l’heure dite.
Une personne sortit de l’ascenseur.
Elle prit un siège à proximité, consulta son portable, jeta un oeil alentours et replongea dans son portable.
Visiblement elle attendait.
Histoire de me dégourdir les jambes, je me suis levée, j’ai traversé le hall pour la saluer.
« Bonjour, vous attendez quelqu’un?
-Oui
-OK, parce que j’attends aussi quelqu’un et je sais pas qui…
-Oh… Moi je sais qui j’attends, donc c’est pas vous.
-Parfait, merci »
J’ai adoré!
Vraiment.
Et je suis retournée m’asseoir.
M’inspirant d’un scenario de film d’espionnage, j’ai ouvert le guide des spectacles pour avoir l’air absorbée par la lecture.
En fait, tous mes sens étaient en alerte, prêts à capter le moindre frémissement.
Une personne sortit de l’ascenseur, celle qui y était entrée peu après mon débarquement sur les lieux.
Elle vint parler silencieusement à celle qui attendait.
Une énigme se résolvait.
C’était sans compter sur une volte face tranquille.
Tout sourire, l’inconnu s’approcha vers moi.
Sa voix était douce, paisible.
« Joelle, en fait, j’ai un problème… en fait… on arrive aujourd’hui…
– Oui… normal…
– Est-ce qu’on pourrait décaler de 50mn?
-Oui… j’vais aller manger… j’vais aller voir une expo…
– On dit 14h ici.
-OK »
Tout à fait fière de mon talent de physionomiste, j’ai ramassé mon sac pour m’en aller vers le LU.
Ce faisant, je suivais les deux hommes que je n’avais pas du tout l’intention de suivre.
Las… L’expo était encore fermée.
J’en ai profiter pour laisser quelques sous à la librairie, puis j’ai cherché une autre occupation pour passer le temps.
Je n’avais pas faim.
J’ai marché.
Une petite porte bleue m’attira.
Une affiche fort simple y était collée : « En réalité je n’ai trouvé que du sable »
Je suis entrée.
C’était à mon goût, tout était à mon goût : les dessins, les couleurs, les questions autant que le concept lui-même.
En réalité, je n’ai trouvé que du sable…
Je souriais à ces mots qui en entrainaient d’autres, tout comme un vent doux soulève la poussière dans le désert, découvrant des trésors, sculptant délicatement l’infinité du sable.
J’étais au coeur de l’aventure.
Aussi accro à la haute technologie que tout explorateur contemporain, je consultais néanmoins régulièrement mon téléphone.
Un nouveau message disait : « Finalement, on pourrait se retrouver au LU! »
Je suis partie pour une nouvelle traversée.
Un héron m’arrêta tout net.
Fier comme un coq, il était cramponné à la rambarde, regardant dans le vide, au dessus de l’eau noir sortant du tunnel.
Magnifique.
J’ai fait un pas de plus.
Il a fait semblant de s’en aller.
je suis restée sans bouger.
Il est resté.
A trois mètres.
Puis, il était temps d’avancer.
Il s’est envolé!
(A suivre)