Le respect.
Il faut respecter son cheval, respecter les vieux, respecter les lois, respecter la nature, respecter les horaires, la vie privée des gens et tant et tant.
Mon cheval, lui ne respecte rien!
S’il reste sagement derrière le minuscule fil électrique, c’est qu’il craint de recevoir une décharge. S’il lève les pieds sur un obstacle, c’est qu’il déteste se faire mal, s’il ne me marche jamais dessus, c’est que je suis super attentive et que je veille à lui éviter les surprises et les peurs, etc.
Un cheval pas plus qu’un jeune enfant ne connait le respect, car le respect est principalement de nature éthique.
Respect.
Voilà encore un mot fourre-tout utilisé à tort et à travers sans vraiment prendre le temps de le définir. Nous avons tellement tendance à limiter notre vocabulaire que parfois il devient impossible de se comprendre à travers le langage parlé ou écrit!
Je renonce à entrer ici dans une grande dissertation philosophico-politique et je vais seulement parler au sujet du respect tel que je le conçois en équitation.
Et comme souvent, c’est une petite histoire que je vais raconter.
L’idée du respect a germée ce matin, après la session en compagnie de mon p’tit pur-sang.
Elle m’est venue parce que ce matin précisément, je lui ai demandé de galoper.
Je lui ai demandé quatre fois, deux fois de chaque côté, à main droite puis à main gauche.
Ceux qui suivent savent que ça fait déjà quatre mois que j’ai acheté ce cheval, quatre mois que je m’occupe de lui à raison de six jours sur sept chaque semaine.
– Quoi ??? En quatre mois et tout ce temps passé avec lui tu n’avais jamais galopé ?
– Ben non…
– Pourquoi, t’avais peur ?
– Je dirais plutôt que c’est par respect pour lui que je n’ai pas eu envie de lui demander le galop lorsque je suis dessus.
– Tu m’expliques ?
En premier, ce cheval étant un galopeur né qui est passé par un centre d’entrainement dès avant ses deux ans, je n’ai jamais eu aucun doute quant à ses compétences en matière de galop.
En deuxième, je sais qu’il fut sorti d’entrainement à la fin de décembre dernier, il a ensuite trainé dans l’antichambre de la boucherie sans la moindre activité physique, s’est finalement retrouvé en transit chez un marchand, puis castré donc « mis au repos » (c’est toujours amusant de parler du repos d’un individu sans activité…) et hop, je l’ai récupéré. Il était physiquement en état, mais totalement démusclé.
Quel cavalier sensible aurait donc pu le faire galoper sans attendre ? Et pourquoi faire ?
J’ajoute que le p’tit cheval s’est visiblement retrouvé très tôt poussé à galoper sous un poids démesuré. (cf la capture de vidéo posée en illustration)
Comment oublier que dans la très bonne écurie de course où je fus un temps cavalière, les « deux ans » étaient réservés aux apprentis qui pesaient moins de 40kg tout mouillés ? Jamais le « patron » n’aurait imaginé surcharger ces petits chevaux « pas encore finis ». Quand je pense que certaines personnes se plaisent à raconter que c’était pire « avant »! C’est un autre sujet.
Toujours est-il que j’ai cultivé la patience par respect envers ce p’tit pur sang et aussi, très égoïstement pour agrandir tout ce qu’il m’apporte déjà sans le savoir lui-même.
Il me fallait attendre qu’il se retape après le bouleversement hormonal subit (nécessité de considérer, d’un côté la récupération post-chirurgicale rapide, et de l’autre la récupération d’un équilibre hormonal, beaucoup plus lente).
Il me fallait attendre qu’il retrouve une masse musculaire suffisante pour me trimbaler au galop sans souffrir.
il me fallait attendre qu’il accorde assez de confiance afin de galoper sereinement, sans que ce soit associé à un quelconque réflexe de fuite.
Il me fallait attendre, c’était une question de respect.
Aujourd’hui était « le » jour.
L’air était clair et calme.
Je commence à bien le cerner, à comprendre ses réactions, ses impatiences et son goût pour la nouveauté. Ce matin, au milieu de la gamme d’exercices prévus, un « je ne sais quoi » m’a poussée à tenter la demande.
C’est aussi « ça » l’équitation, ces « je ne sais quoi » que certains pourraient nommer… le feeling?
Aujourd’hui, nous avons galopé.
Galopé juste et un peu, pas plus d’une ligne droite, juste pour le plaisir de savoir que nous pouvons le faire ensemble, tranquillement, en douceur.
C’est fragile une relation.
Et ça se respecte !
😉
Ce billet, complété par la discussion que nous avions eue il y a quelques semaines, m’amène à revoir complètement ce que j’imaginais des chevaux.
Point numéro 1 : les chevaux aiment galoper. C’est vrai qu’un cheval qui court est très beau à voir. Cette course légère, sans effort apparent, laisse penser que c’est quelque chose qu’il apprécie. Tout comme un athlète aime courir. Erreur de ma part. Courir pour un animal, herbivore et proie potentielle, c’est pour fuir un danger. Pas pour le plaisir.
Numéro 2 : le toucher, les caresses en signe de gratification. Encore une erreur de ma part.
Je me suis rendue compte à ce moment là à quel point j’ignorais le monde du cheval, non pas que je me vantais de le connaître, bien au contraire, mais le peu que je pensais connaître était faux.
Comme quoi cela remet beaucoup de choses en perspective. Je regarde mon chat différemment. J’essaie de ne pas interpréter son comportement au travers de mes yeux et mon cerveau d’humaine… pas simple. Comment se mettre dans la peau d’un chat ? Comment communiquer efficacement avec lui ? Ah, j’ai appris qu’un chat ne miaule que très rarement dans la nature. Les chats ne discutent pas entre eux en miaulant. Mais, pas bêtes, les chats domestiques ont compris qu’en miaulant ils captent notre attention. De là à ce qu’il ne manque plus que la parole à Minet (ou Médor), il n’y a qu’un pas, que je ne franchirai pas.
C’est fragile une relation, avec un animal ou avec un humain et dans les deux cas, trouver comment respecter l’autre est essentiel pour établir la confiance. Je crois que j’ai encore beaucoup à apprendre.