De la reproduction

Il serait à la fois vain et prétentieux d’écrire ici un énième billet au sujet de la reproduction de nos orchidées sauvages occidentales. Les passants les plus curieux trouveront sur la toile des informations très pointues, très globales, parfois pas vraiment justes, parfois pas tout à fait fausses et chacun prendra ce qu’il a besoin de récupérer.

Quel est donc l’objet de ce billet ?
En premier l’image qui vient en tête.
Une graine de capucine (Tropaeolum majus) quelques graines de persil (Petroselinum crispum) et un nuage de graines d’ophrys abeille (Ophrys Apifera) sont photographiés ensemble sur le plan de travail mélaminé de la cuisine.
Pas besoin d’argumenter davantage à propos la taille des graines!

Voilà ce qui inspire ce billet, au départ, une histoire de taille qui fait toute la particularité de ces plantes.
Une histoire fascinante.

Si la fleur a été fécondée, l’ovaire gonfle.
Une fois la fleur fanée, il ne reste que l’ovaire qui sèche et s’ouvre un jour, faisant échapper au vent des milliers de ces minuscules graines.
En aparté, la parabole de la graine de sénevé fut imaginée dans une époque où il fallait parler aux gens de ce qu’ils connaissaient, donc des semences habituellement utilisées tout en oubliant que la nature faisait le job seule et à sa manière. Il y aurait de joyeuses paraboles à inventer avec les graines d’orchidées!

Car, sur les milliers de graines envolées, seulement quelques unes parviendront à germer.
Portées par le vent, parfois sur des centaines de kilomètres, les graines tombent souvent en milieu hostile, servent de nourritures ou dépérissent spontanément.
Qu’une graine ait la chance d’arriver sur un biotope favorable ne suffit pas.
C’est une graine d’orchidée, pas une graine « normale ».
Elle ne dispose d’aucune réserve pour germer et il faut donc une astuce pour disposer des enzymes, des vitamines et de l’énergie (sucre) indispensable au processus de germination.
Elle a besoin d’aide.
Le plus souvent c’est un rhyzoctonia qui fera l’affaire.

(En fin de 19ème, découvrant l’association de ce filament microscopique avec la graine d’orchis (réalisant une parfaite symbiose dans les cas où « ça marche ») le botaniste Noël Bernard fit grandement avancer la connaissance des Orchidées.)

Une fois l’affaire favorablement conclue, apparait un protocorme (Du grec ancien « protos » et « kormos » soit littéralement, « ce qui vient avant le bulbe ») et l’attente commence. Selon les espèces et les conditions environnementales, il faudra compter entre 2 et 15 ans entre la germination et la floraison!
Dans tous ce temps « invisible » se succèdent plusieurs cycles végétatifs.
Enfin, un jour à la fin de l’hiver, se sentant assez remplie d’énergie, une plantule ose l’aventure, elle se hisse avec vigueur et sans aucun doute vers la lumière. Au début du printemps, une « rosette » apparait.
Dans le même élan, pendant que le bulbe initial se flétrit déjà, pompé par la formation aérienne, sous terre un nouveau bulbe se crée et emmagasine des réserves.
Tandis qu’apparait la fleur qui nous émerveille, le cycle se poursuit.
Sur le dessin suivant (dessin anonyme sans copyright), il est facile de constater que la vie de cette plante est principalement souterraine.

Après ce bref récit, il devient facile de comprendre pourquoi ces orchidées si charmantes ont besoin d’un milieu stable. Leur germination est complexe, leur croissance est super lente, elles vivent en symbiose. Tous les biotopes en permanence modifiés par les interventions humaines leur sont hostiles.

Heureusement, il reste des zones où l’humain n’a pas la capacité de gérer.
Et puis désormais, il est admis que tout faucher n’est pas une solution, ni même esthétique, que la nature pour s’exprimer a besoin de fantaisie et d’herbes folles.
Et comme les graines d’orchidées peuvent voyager sur des kilomètres, elles peuvent aussi tomber un jour dans des endroits à nouveau respectés.

Il est probable que nous n’avons pas fini d’être surpris.

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