31 juillet 2018

L’âme n’est rien que l’invisible
Et l’invisible est tout ce que l’on voit
Ou plutôt tout ce qui est sous nos yeux
Demande à être vu
Désespère d’être vu
Appelle, appelle, appelle
Christian Bobin, La vie passante, Editions Fata Morgana, 1990, ISBN 978-2-85194-906-6

Le ciel était absolument clair jusqu’au fond de la vallée tandis que nous ouvrions notre dernier matin sur Oahu.

Aucun programme programmé.
Sinon faire les valises
Et voler plus loin.

Fuyant une nouvelle attente dont j’aurais été la seule maitresse, j’ai décidé de retourner voir la cascade.
Seule.
J’avais besoin d’en sentir le caractère sacré dans l’éclaboussure de ses embruns.
Seule.

Il faut croire que je fus entendue, car le chemin était désert et j’ai pu me l’approprier entièrement.
La cascade dégringolait joyeusement, j’ai eu le temps de jouer dans son bassin de réception sans qu’aucun de ces touristes avides d’apparence, de photo et de selfies, ne hantent « mon » instant.
Je suis partie quand le premier est arrivé.
J’ai poursuivi la grimpette, plus haut.
Mais le temps était compté, j’ai fait demi-tour.

Simplement heureuse, je marchais vite,
Sans souffler
J’étais sur les talons d’un groupe qui descendait aussi.

A l’occasion d’un élargissement du sentier, j’ai mis mon clignotant pour les dépasser, je n’ai pas eu besoin de franchir la ligne continue mais au moment même où je songeais à me rabattre, le gamin de devant refusa de me laisser doubler, il accéléra au pas de course.
La gamine qui dort encore dans mes veines réagit aussitôt d’un tonitruant « Oh… No… OK » amusé et je suis partie en courant.
Et l’imprévisible joua sa partition.
Tout aussi amusé, l’homme que je venais de doubler s’accrocha à mes sandales, avec toute la vitesse dont son ventre rond lui permettait de disposer.
Et nous avons joué ainsi jusqu’au parking!
Et c’était absolument délicieux.
Le gamin se retournait pour voir si je suivais et je suivais, tout à fait réjouie de sauter d’une pierre à l’autre, légère comme je ne savais même plus que j’étais capable de l’être : c’était pas la vieille qui courrait, mais bel et bien la gamine qui jouait!
L’homme avait perdu d’avance, nous étions plusieurs longueurs devant après seulement une centaine de mètres!
D’ailleurs, il avait abandonné la course lorsque je l’ai enfin vu arriver à la barrière où je l’attendais pour le remercier de m’avoir offert un si merveilleux moment.
Il m’a embrassé et ils ont fait une photo souvenir.

J’ai adoré ce moment magique d’alliance éphémère, loin de toute intention, une reliance improvisée légère et gaie.

Il me restait un temps beaucoup plus large que prévu avant de retourner boucler mes valises.
J’ai lézardé, chassé du regards les orchidées cachées dans les jardins, admiré le vieux chinois en pierre qui gardait le cimetière et je suis rentrée.

Trois heures plus tard, nous atterrissions à Maui.

Le « cottage soleil » qui nous était réservé était à la hauteur de mes attentes.
Dans le « cottage lune » d’à côté, un des gars qui avait fait la M2O en SUP foil pliait bagages : après plus d’un mois passé à s’entrainer sur le Ka’waï Channel et sur le Maliko run, il rentrait dans son pays « du soleil levant ».

Une fois installés, chacun dans notre antre, il fallait aller faire les courses ensemble, penser au repas du soir.
Mais avant, j’avais une proposition en tête : passer voir Hookipa et saluer les tortues.

C’est ce que nous avons fait.

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