Navigation

Une épreuve sportive de longue distance, en mer, était organisée au départ de Sainte Marine.
J’avais négocié ma participation de « fille » au titre suivant : « les filles sont des hommes comme les autres et j’ai envie de faire ce parcours »
L’accord me fut donné.

Si les filles sont des hommes comme les autres, il faut bien reconnaitre que leur puissance physique n’égale pas celle des mâles, et ce d’autant moins que l’épreuve se nomme « te aïto » ce qui signifie « le guerrier ».

Dès le départ en effet, un bon paquet de « guerriers » s’était précipité derrière un « bateau ouvreur ».

Je les ai vu disparaitre à l’horizon.

Après quelques kilomètres, le capitaine de frêle esquif que j’étais n’avait aucun moyen visuel suffisant pour attraper le moindre point de repère fixe.

Scrutant l’immensité, j’ai aperçu ce qui pouvait être l’île sur laquelle je devais me diriger. J’avançais régulièrement, tranquillement et l’île se précisait, puis le phare se distingua de la mature des grands voiliers qui passaient devant.
L’île des moutons, était située avant la mi-course, à environ 10 km de la côte. Il fallait ensuite tirer tout droit vers un point dont j’ignorais tout du paysage. Ce que j’avais retenu c’était « 297° ».

J’avais emporté un compas de navigation.

Le soir, en regardant le relevé GPS sur écran, j’ai constaté que j’avais globalement bien tenu le cap, malgré le vent et les courants puissants  (marée de pleine lune).

Et alors?
Oui, et alors…

Et alors, j’ai rattrapé un gars qui se sentait perdu.
Il ne connaissait pas du tout le coin, nous étions à égalité!
Nous étions à égalité, loin des bateaux de surveillance, loin derrière les grands « guerriers », loin devant le bateau « balai ».
Nous étions seuls sur l’océan guettant la moindre balise qui aurait pu nous mettre sur le « bonne route ».
Nous avions le même objectif : aller là-bas.

Le gars me héla:

« On va par où »
Je tendis le bras « Par là »
« Tu as un compas »
« Oui »

Et alors?
Oui, et alors…

Ce matin, en re-visitant l’aventure, en revoyant la détresse de ce gars qui avait perdu toute certitude en perdant ses repères, ce gars qui se laissait submerger par la fatigue et anéantir par les doutes, j’ai une fois de plus pensé au désert et aux histoires de navigation.

Parfois, il semble que rien ne peut nous aider, que l’horizon est trop vaste, qu’aucun signe ne nous parvient.
Ces fois là, il suffit d’avoir un objectif et de s’y tenir.

297°

Certes, il n’est pas facile d’avancer.
Certes, la progression peut paraitre « non linéaire ».
Pourtant, il suffit d’avancer.
Il suffit d’avoir confiance.

Et d’un coup, les signes arrivent.
Et soudain, tout s’éclaire.

Et alors?
Oui, et alors…

Alors… C’est une expérience de simple bonheur!
Je suis définitivement enthousiaste et inconditionnelle de la navigation

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