
Rédigé en juillet 2019
Les jours se sont suivis sans jamais se ressembler apportant leur lot de surprises, de patience, de doute et d’intense bonheur.
Après le deuxième grand barrage et un providentiel lâcher d’eau, le cours est devenu un peu mieux navigable, d’autant plus que je commençais à savoir bien lire les moindres ondulations. Mais il suffisait d’une légère brise pour semer le trouble et rendre difficile à interpréter l’écriture diaphane et impalpable posée sur le flot.
Après la rudesse des paysages de montagne, j’ai traversé la campagne bucolique où les animaux domestiques paissaient en nombre, où les animaux sauvages passaient parfois.
La traversée hâtive d’un grand cerf fuyant ma présence reste marquée dans ma mémoire comme une merveille sortie d’un conte de fées. Aucune image ne peut retranscrire l’immensité de ce que j’ai traversé.

Après le « bec d’Allier » et la magie du mélange des eaux, le « fleuve » est enfin présent, plus large, plus puissant.
De pont en château, de village en centrale nucléaire, de boulangerie en supérette, de bivouac en bivouac, j’ai poursuivi ma progression.
A Tours, des touristes anglais en goguette m’ont aidé à porter le matos pour passer le vieux pont, fiers de participer à une aventure dont ils ignoraient tout. Pour la première fois depuis le début du périple, je fus prise au sérieux alors que j’affirmais souhaiter aller à la plage!
D’où je venais importait peu, là-bas l’océan parait assez proche mais suffisamment loin pour que le rejoindre soit déjà un remarquable objectif…
Une fois traversé le pont de Cé, sous la « bonne » arche et sans tomber à l’eau, j’étais définitivement sur un tapis roulant… à condition d’attraper le « bon sens » du courant après Ancenis.
J’ai planté l’avant dernier bivouac en aval de Nantes, stoppée net par le courant de marée montante.

Le lendemain matin, après un café offert par les locataire de la pelouse que j’avais squatté, j’ai guetté le premier signe de marée descendante pour l’ultime longue étape, la plus stressante car pour une fois il fallait faire la course et arriver en quatre heure à l’estuaire sous peine de me trouver dans l’impossibilité de tourner la pointe de Mindin.
Mon rêve ultime était au bout du jour : dormir devant le serpent illuminé, à proximité du pont, face à la grande fabrique de paquebot, à cet endroit précis où la Loire s’achève en se perdant dans le commencement de l’océan.

Et j’y suis parvenue, sous un léger crachin qui avait le goût du sel.
Michel était là pour immortaliser le passage.
Il s’étonna de m’entendre dire que je préférais dormir une fois de plus sous la tente, il avait imaginé que j’allais passer la nuit à la maison et achever le trajet le lendemain comme un bonus. Il est vrai que j’étais arrivée « à la plage ».
Mais mon objectif était « ma » plage et j’avais besoin d’un « entre-deux » pour respirer, apprécier, laisser s’élargir la magie de ce que je venais de vivre, trois semaines durant.
Il faisait beau le lendemain et j’avais toute la journée pour accomplir les quelques kilomètres qui restaient, mais la marée restait le maître du temps.
Je suis arrivée au Cormier le 21 septembre 2012, pour l’occasion il y avait foule sur la plage, pas moins de huit personnes m’ont accueillie sans avoir d’autre choix que d’écouter des bribes d’aventure! Jamais je n’ai eu un aussi grand comité d’accueil à la fin de mes nombreux trips.
C’est certainement parce que cette fois-ci, j’avais réussi un « truc » que personne n’avait jamais essayé!


Il me restait alors à tenir ma promesse : raconter ce qui était racontable sur le forum où j’avais lancé l’annonce.
En attendant, j’avais faim de crudités!
Tu es vraiment … incroyable !
d’une liberté insolente (?) écrirais je presque !